La Suisse accuse Rifaat Assad de crimes de guerre dans le massacre de Hama en Syrie
Le frère du président syrien Bashar al-Assad, Rifaat al-Assad, a également été reconnu coupable de crimes financiers en France.
La Suisse a accusé mardi l'oncle du président syrien Bachar al-Assad de crimes de guerre, devenant ainsi le deuxième pays européen à prendre de telles mesures contre l'ancien officier de l'armée.
Rifaat al-Assad, 86 ans, a été inculpé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, a indiqué le ministère public suisse dans un communiqué. Assad aurait ordonné des homicides, des tortures et des détentions illégales de milliers de civils en 1982 alors qu'il commandait les brigades de défense du gouvernement et les opérations à Hama, dans le centre de la Syrie , selon le bureau.
Le gouvernement syrien n'a pas immédiatement commenté ces accusations.
Le bureau a ouvert une enquête criminelle sur Assad après une plainte déposée en 2013 par l'organisation TRIAL International, basée à Genève. La Suisse peut engager des poursuites judiciaires contre Assad en vertu du principe de compétence universelle pour crimes de guerre et parce qu'il se trouvait en Suisse au début de l'enquête, selon le communiqué.
Les accusations portent sur le massacre de Hama en 1982, dans la ville éponyme du centre de la Syrie. Les Frères musulmans menaient alors un soulèvement contre le gouvernement du défunt président Hafez al-Assad, le frère aîné de Rifaat. La révolte a été écrasée lorsque les forces dirigées par Rifaat al-Assad ont assiégé puis pris d'assaut Hama. Le Réseau syrien des droits de l'homme estime qu'entre 30 000 et 40 000 civils ont été tués lors de l'assaut.
Assad a été exilé de Syrie en 1984 après l’échec d’une tentative de coup d’État contre son frère. Il a voyagé en Suisse puis en France avant de retourner en Syrie en 2021. La même année, le ministère public suisse a tenté d'émettre un mandat d'arrêt à son encontre, mais le ministère de la Justice a estimé que le pays n'avait pas compétence pour le faire. Un tribunal suisse a annulé le ministère en 2022, permettant au pays d'émettre un mandat d'arrêt, selon l'Agence France-Presse.
Rifaat al-Assad est apparu pour la dernière fois en public sur une photo avec l'actuelle présidente et première dame Asma al-Assad en Syrie en avril dernier. On ne sait toujours pas s’il réside désormais en Syrie ou ailleurs dans la région.
Même s’il est peu probable qu’Assad revienne en Suisse pour son procès, la loi suisse autorise les procès par contumace sous certaines conditions.
TRIAL International a salué la nouvelle des accusations portées contre Assad.
« Avec l'acte d'accusation d'aujourd'hui, les victimes peuvent enfin espérer que justice soit rendue », a déclaré l'organisation dans un communiqué. « Rifaat al-Assad, l'oncle de l'actuel président syrien Bashar al-Assad, sera l'un des plus hauts responsables gouvernementaux jamais jugés pour des crimes internationaux fondés sur le principe de compétence universelle. »
Pourquoi c’est important : Ces dernières années, plusieurs gouvernements européens ont tenté de juger des Syriens pour crimes de guerre. Contrairement à l’affaire Assad, les autres procédures sont liées à la guerre civile syrienne en cours.
Voici un aperçu de certaines des récentes procédures judiciaires en Europe contre des Syriens accusés de crimes de guerre :
- La Belgique a arrêté en janvier un homme soupçonné d'avoir commis des crimes de guerre alors qu'il faisait partie d'une milice gouvernementale pro-syrienne.
- Un tribunal néerlandais a condamné en janvier un membre d’une milice gouvernementale pro-syrienne pour crimes de guerre.
- Un tribunal français a émis un mandat d'arrêt contre le président en novembre pour complicité de crimes de guerre.
D’autres en Europe ont été poursuivis pour avoir prétendument combattu au sein de groupes rebelles syriens. En 2014, l’Allemagne a inculpé un homme d’appartenance à une organisation terroriste pour son implication présumée dans le groupe rebelle syrien Junud al-Sham.
En savoir plus : La Suisse n’est pas le seul pays où Assad est en difficulté juridique. En 2021, un tribunal français a confirmé la peine de quatre ans de prison prononcée contre lui pour délits financiers. Assad a été reconnu coupable d'avoir détourné des fonds syriens et de les avoir utilisés pour acheter une grande quantité de biens immobiliers en France, selon l'AFP.